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Journal électronique du LPO Jean-Moulin
31 janvier 2010

A propos de Roberto Zucco

theatre_007Fin novembre, Madame Vidal, professeur de français, a organisé une soirée théâtre au Théâtre des Treize Vents à Montpellier, où se jouait Roberto Zucco de Bernard Marie Koltès.

Cette pièce est la dernière œuvre de Koltès. Il l’écrit en 1988, atteint du sida. Inspirée de faits réels, elle relate l'histoire du tueur en série italien Roberto Succo. Il met ce personnage curieusement attachant, doux mais capable du pire (matricide, meurtres…) en scène, lui faisant rencontrer une gamine qui tombe éperdument amoureuse de lui au point de se prostituer pour le retrouver, un vieil homme perdu la nuit dans le métro, une femme distinguée qui n’a pas froid aux yeux… Et cela entre son évasion de prison, jusqu’à son arrestation et la fin de son second séjour en tant que détenu.

Cette mise en scène de Christophe Perton était vraiment très intéressante. Dès que nous sommes entrés dans la salle, les comédiens déambulaient sur la scène qui était composée d’une autre estrade avec des rideaux rouges, et un écran, où était projeté un film en anglais et, noir et blanc, dans lequel durant une soirée dansante assez élégante, un homme plutôt étrange dans sa façon de bouger et dans la lueur animale de son regard vient jouer les troubles fêtes. theatre_012Devant cette estrade étaient installés des sièges de théâtre rouges, sur les côtés des penderies pleines de vêtements, et une table et un micro. Les comédiens marchaient donc sur le plateau, de façon plutôt neutre, s’habillaient, puis s’asseyaient sur les sièges, puis se relevaient pour s’asseoir ailleurs. Ce sont les deux premières choses que Céline Garcia, professeur d’Art Dramatique du conservatoire de Béziers m'a appris: marcher avec une tenue du corps correcte et neutre (cela peut paraître étrange mais on ne marche pas pareil dans la rue que sur le plateau) et être présent sur le plateau sans captiver le regard du spectateur, mais au contraire en l’incitant à regarder là où notre regard se pose. La présence de tous les comédiens sur toute la pièce m’a énormément plu. C’était un peu comme un relais, les comédiens se passent la parole et à tour de rôle, vivaient et respiraient. Toujours en rapport avec les corps, certaines scènes de la pièce se passent dans une maison close, l’atmosphère devenait vraiment plus chaude, les prostituées dansaient sur des musiques lentes avec ou sans clients. J’ai trouvé cela très intéressant, on passait dans un autre monde, tout en douceur, sans pour autant que ce milieu nous paraisse vulgaire comme on pourrait s’y attendre. De même il y a une scène où Roberto Zucco et une dame se retrouvent dans une foule de corps immobiles, qui lorsque la poursuite les éclaire, se mettent à bouger très lentement jusqu’à s’immobiliser dans une autre posture. Ou encore les morts se relèvent comme des somnambules, et quittent le centre de la scène en déambulant comme des zombis. J’ai trouvé les corps très gracieux, et bien que s’inspirant très fortement des bases de l’Art Dramatique, la mise en scène très originale.

D’autant plus, qu’il y a eu une recherche au niveau du son. Le micro visible sur scène servait de téléphone à Roberto Zucco, ou pour dire les didascalies de la dernière scène. Ou encore des micros cachés dans les vêtements des policiers pour espionner et communiquer entre eux de ce qu’ils voyaient. Et il y a eu aussi une recherche de niveau d’apparition: l’estrade sur la scène, la scène, au des
theatre_005sus encore de l’estrade (on ne voyait que les pieds dépasser), dos au public…

Encore une chose qui m’a énormément touchée
: la présence du travesti dans la maison close, et la scène de fin, où deux comédiens de sexe masculin se retrouvent dos au public face à la mer (images projetées). Koltès était homosexuel. Et la présence de ce personnage et de cette scène finale (pas présente dans le livre) était très symbolique. Il s’agissait en quelque sorte de lui rendre hommage mais aussi de débloquer un peu les mœurs, car l’image de fin est romantique et poétique, tout comme le serait un couple d’hétéros se tenant la main sur une plage au soleil couchant.

Enfin ce fut une très bonne expérience, très surprenante. Je pense pouvoir dire que la mise en scène m’a apporté une nouvelle vision du théâtre, plus de spontanéité peut-être dans mon jeu, puis l’idée que le comédien est un corps vide et neutre qui prend vie soudainement. Et puis ne pas oublier, que notre rôle premier est de servir le texte et l’auteur, donc les clins d’œil le symbolisant sont comme un remerciement de nous avoir offert ce texte à partager.

Stella Puyo

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